Article de presse
Rapport 2022 du GIEC sur les impacts climatiques, l'adaptation et la vulnérabilité : Quels sont les enjeux pour l'Afrique ?
Le28 février 2022, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) des Nations unies a publié la contribution du groupe de travail II au sixième rapport d'évaluation (AR6) intitulé "Changement climatique 2022 : impacts, adaptation et vulnérabilité". Le rapport, qui a depuis été décrit par le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, comme "un atlas de la souffrance humaine et un réquisitoire accablant contre l'échec du leadership en matière de climat", s'appuie sur 34 000 études, impliquant 270 auteurs de 67 pays.
Le rapport dresse un tableau inquiétant des conséquences du changement climatique sur les communautés marginalisées et met en lumière l'emprise du changement climatique sur le continent africain. L'Afrique, qui a le moins contribué historiquement aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, devrait continuer à subir de graves dommages en raison du changement climatique. Bien que les effets globaux aient été ressentis progressivement avec une augmentation de la température de 1,1 degré due au changement anthropique, les implications du changement climatique sur l'écosystème africain sont de plus en plus préoccupantes, plusieurs pays d'Afrique centrale, de l'Ouest et de l'Est étant considérés comme les plus vulnérables.
Les auteurs affirment avec conviction que le changement climatique anthropique est responsable des conditions climatiques difficiles actuelles. Avec un réchauffement de seulement 1,1 degré, le changement climatique provoque des perturbations généralisées telles que des sécheresses et des inondations qui menacent en fin de compte la sécurité alimentaire de millions de personnes à travers l'Afrique. Selon le rapport, la productivité totale de la croissance sur le continent a diminué de 34 % depuis 1961 en raison d'événements climatiques extrêmes. Entre 2015 et 2019, 62 millions de personnes en Afrique orientale et australe et 45,1 millions dans la Corne de l'Afrique auront besoin d'une aide humanitaire pour faire face aux urgences alimentaires liées au climat. Ces perturbations agricoles sont étroitement liées aux variations extrêmes des précipitations.
La production agricole devrait se détériorer en raison du raccourcissement des périodes de végétation, des périodes de sécheresse en milieu de saison, de l'intermittence des précipitations et de l'intensification du stress hydrique. Selon le rapport, environ 250 millions de personnes pourraient être confrontées à un stress hydrique élevé d'ici 2030 en Afrique. En outre, la baisse des rendements sera partiellement compensée par l'augmentation des concentrations de CO2 dans l'atmosphère, qui accroît le taux de photosynthèse, stimulant ainsi la croissance des cultures. Toutefois, cet effet contraire sera négligeable si le réchauffement atteint 2 °C, ce qui entraînera des baisses de rendement considérables pour les cultures de base. En cas de réchauffement de 2°C, les rendements du maïs en Afrique de l'Ouest devraient diminuer de 20 à 40 %, tandis que si nous atteignons un réchauffement de 1,5°C, le potentiel de capture des pêcheries devrait diminuer de 40 % en Afrique tropicale, ce qui exposerait près de 300 millions de personnes à des risques de carences en micronutriments, en particulier les enfants et les femmes enceintes.
Depuis le cinquième rapport d'évaluation du GIEC en 2014, il est évident que l'exposition aux effets du climat a augmenté de façon spectaculaire dans les villes. L'augmentation de la vulnérabilité s'est produite dans les établissements urbains informels, où le manque de logements convenables et l'accès limité aux services et ressources de base entravent les efforts de renforcement de la résilience. Ce problème est particulièrement aigu en Afrique subsaharienne, où 60 % de la population urbaine vit dans des établissements informels.
À la suite des conversations de la COP26 de 2021 qui s'est tenue à Glasgow, les politiques climatiques d'au moins 170 pays intègrent désormais l'adaptation, mais beaucoup doivent encore passer à la mise en œuvre. Le GIEC constate également un écart financier considérable entre les niveaux d'adaptation actuels et ceux qui sont nécessaires. Le GIEC estime en outre que les besoins en matière d'adaptation atteindront 127 milliards de dollars et 295 milliards de dollars par an pour les seuls pays en développement d'ici à 2030 et 2050, respectivement. À l'heure actuelle, l'adaptation ne représente que 4 à 8 % du financement de la lutte contre le changement climatique, qui s'est élevé à 579 milliards de dollars en 2017-2018.
Le sommet de 2022 de la COP27, qui se tiendra en Égypte, représente une occasion cruciale pour les gouvernements africains de progresser et pour les pays développés de démontrer leur solidarité avec les nations vulnérables. Les prochaines années offrent une fenêtre étroite pour réaliser un avenir durable pour tous. Pour changer de cap, il faudra déployer des efforts de collaboration immédiats afin de réduire les émissions, de renforcer la résilience et d'accroître le financement de l'adaptation. Selon Hans-Otto Pörtner, coprésident du groupe de travail II du GIEC, "les preuves scientifiques sont sans équivoque : le changement climatique est une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète. Tout retard supplémentaire dans la mise en œuvre d'une action concertée à l'échelle mondiale nous privera d'une fenêtre brève et qui se referme rapidement pour assurer un avenir vivable".
*Rédigé par J. Akinyi